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| | Bibliographie
(1) Les saints sourciers
(2) LA FORÊT DE BROCÉLIANDE
Gaël, petit bourg, situé dans le bocage au nord de la forêt de Brocéliande, a été jadis la capitale de la Bretagne nord. C'est en effet là que résida le roi Judikaël. L'abbaye de Saint-Méen a été construite sur cette commune. Du Taya (Brocéliande, 1839) mentionne, à propos de la fontaine de Gaël, que le roi Hoël III, au VIème siècle, souverain de cette ville royale, donna asile au moine saint Méen. Celui-ci décida d'y construire une abbaye. Comme les ouvriers employés à monter les murs se plaignaient de leur éloignement d'un point d'eau, Méen, à la manière de tant de saints bretons, planta son bâton en terre et fit jaillir une source.
C'est aujourd'hui cette source qui est dédiée à saint Méen. Elle eut la vertu de guérir les enfants atteints de croûtes de lait, d'ulcères ou encore de la lèpre. On y venait aussi boire son eau pour soigner une morsure de chien enragé. Mais la célébrité est due au pouvoir qu'elle possédait de guérir le mal des ardents. On a déjà eu l'occasion, à SaintGobrien (Morbihan), de parler de cette maladie provoquée par un parasite qui affectionne le seigle. Mais arrêtons-nous pour examiner de plus près ce mal peu connu et pourtant répandu au Moyen-Age. Mal des ardents, feu sacré, feu Saint-André, feu Saint-Antoine, feu d'enfer ... sous ces vocables divers, apparaît au milieu du Xème siècle la terrible maladie qui ne disparaîtra qu'avec les mesures d'hygiène alimentaire.
En 1089, un chroniqueur décrit cette maladie: " Beaucoup d'ergotants, les entrailles dévorées par l'ardeur du feu sacré, avec des membres ravagés noircissant comme des charbons qui, ou bien mouraient misérablement, ou bien conservaient la vie en voyant leurs pieds et leurs mains gangrénés se séparer du reste du corps ... " Cette horrible maladie. que nous appelons, de nos jours, l'ergotisme, faisaient atrocement souffrir: " Les malades poussent des cris et des soupirs lamentables, si haut qu'on les entend à huit ou dix maisons de distance. " Dans sa forme gangréneuse, la maladie laissait des infirmités incurables : manchots, clochants, culs-de-jatte étaient nombreux, surtout en période de famine; autant de personnes qui allaient grossir les rangs des mendiants et des pèlerins. Si, dans certaines régions d'Europe, on tentait quelques moyens thérapeutiques, telle que l'ablation chirurgicale des membres gangrénés ou tel qu'un breuvage composé d'une foule de plantes ... dans les campagnes, le plus souvent, seul le recours à un saint guérisseur pouvait donner l'espoir d'être sauvé. Saint-Méen avait cette réputation, et on venait de très loin pour boire l'eau de la fontaine.
Extrait de :
(1) Les Fontaines de Bretagne, Albert Poulain - Bernard Rio, YORAN EMBANNER, 2008, p.32
(2) Le Chemin des Fontaines, Roger LE DEUNFF, Editions DANCLAU, 1996, p.230,231
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